Art Basel Paris 2025: Binta Diaw

GRAND PALAIS, AVENUE WINSTON CHURCHILL 75008, PARIS, FRANCE, 22 - 26 Octobre 2025 
Pour sa première participation à Art Basel, Binta Diaw poursuit ici son exploration du corps comme territoire sensible et espace de mémoire. Les œuvres, réalisées à partir des tirages photographiques de l'artiste dévoilent des fragments de peau, de mains, de courbes et de plis, saisis dans une lumière qui confère à la surface du corps une densité presque minérale. Photographiés de près et cadrés rigoureusement, ces fragments de corps deviennent des étendues abstraites de terres. Sur ces paysages d'épiderme, Binta Diaw apose ses délicates interventions graphiques - tiges, tresses, branches ou fruits - qui redéfinissent le rapport entre nature et humanité, matière et symbole. Chaque image propose une géographie intime où le vivant se déploie : une plante semble germer le long d'un bras, une tresse traverse une vallée de chair, des fruits naissent d'un relief cutané. Ces gestes simples instaurent une résonance entre l'organique et le spirituel, entre la mémoire corporelle et l'inscription du vivant dans la matière.
 
Les Paysages corporels prolongent les questionnements centraux de la pratique de Binta Diaw : migration, appartenance, identité diasporique et mémoire collective. Par un travail de composition épuré, l'artiste construit une réflexion sur les filiations et les transmissions, sur la manière dont les corps - notamment les corps noirs - portent en eux les traces d'histoires multiples et de violences parfois occultées. En associant le corps noir et féminin à la fertilité du sol, Diaw propose une relecture poétique et politique de l'idée de racine, non plus comme ancrage unique, mais comme réseau fluide et proliférant.
Les interventions manuelles sur les tirages confèrent à chaque œuvre une dimension tactile et sensorielle. Elles incarnent un geste de réappropriation et de soin. Dans la blancheur du fond, le corps s'érige en territoire, le paysage devient peau, et la peau, à son tour, devient lieu d'enracinement et d'émancipation.
 
En proposant une nouvelle cartographie du corps, Binta Diaw élabore une vision du monde où les frontières entre nature et culture, intime et collectif, se dissolvent au profit d'une écologie de la relation.
 
Présentée aux côtés de cette série, l'installation Nero Sangue [Sang Noir] prolonge cette réflexion à travers un langage sculptural. Composée de tomates peintes en noir et vernies avec éclat, rassemblées en un amas dense, l'œuvre condense de multiples lectures : celles du corps et du sang, du fruit et de la terre, du travail et de la mémoire. Par leur teinte sombre et leur brillance presque liquide, ces tomates deviennent métaphore du labeur agricole, de la migration et de l'invisibilisation des corps noirs au sein des dynamiques économiques et sociales contemporaines. La dégradation progressive de l'installation fait partie intégrante de l'œuvre : elle traduit la fragilité du vivant, le passage du temps mais aussi les luttes inégales pour la survie dans une système à deux vitesses. En détournant la couleur du fruit, l'artiste en fait un symbole ambivalent - entre vitalité et deuil, fertilité et exploitation.
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