La Galerie Cécile Fakhoury - Abidjan a le plaisir de présenter Vestiges de la Mé, quatrième exposition personnelle de l’artiste Jems Koko Bi à Abidjan.
Né en 1966 à Sinfra, dans la région du centre-ouest de la Côte d’Ivoire, Jems Koko Bi est un tailleur de bois – un jirignanzan. L’héritage ancestral Gouro qui lui a été transmis se retrouve au cœur de sa pratique. Aux fondements de son histoire personnelle et artistique, Jems Koko Bi ancre ses racines en forêt, ici celle de la Mé, et fait de ce lieu pluriel un atelier à ciel ouvert. Par les gestes subtils et habités de l’artiste, cet espace voit émerger des bois majestueux ayant, pour une raison ou pour une autre, cessé d’exister. Ces formes évoquent alors les puissances de la nature et les contradictions de l’humanité. Tantôt tailleur de bois, performeur ou poète, Jems Koko Bi se fait le messager de la forêt.
Les œuvres parfois monumentales de l’artiste expriment ses questionnements existentiels tout autant que son rapport au vivant, à l’être et au devenir car pour lui, les arbres existent, et au creux de ses mains, ils deviennent. « Si Vivre, c’est se mouvoir, changer d’espace, rencontrer et échanger, et qu’Exister c’est être, occuper un espace de façon permanente et agir, alors un arbre ne vit pas, il existe. L’arbre met fin au voyage de son corps et fait agir son existence en changeant le cours du temps, créant des saisons qui, à leur tour, le transforment. »
La forêt de la Mé - dans la région du sud-est du pays- fait office de fil rouge de l’exposition. De ce lieu où une centaine d’arbres abattus et déracinés par la volonté humaine avaient cessé d’exister, Jems Koko Bi a choisi d’y ouvrir un dialogue entre deux règnes, entre l’Homme et la forêt. Il nous conte une histoire commune, celle d’une main taillée qui devient un hommage à un arbre majestueux autrefois élevé dans sa verticalité. Celle des âmes humaines ayant été contraintes, par le travail forcé, de laisser un vestige végétal derrière elles. Aux yeux de l'artiste, cette histoire est aussi bien synonyme d’anéantissement que de renaissance. Le train de l’âme, Soul train, raconte, lui, la souffrance endurée lors de la construction de rails ayant déchiré et dénigré les âmes. Mais au cœur de cette douleur, figure une barque symbole de liberté et de l’espoir d’un ailleurs. Ces objets gravés dans le même bois se font alors miroir d’un rapport conflictuel mais éternel entre deux acteurs. Car la forêt et son bois sont impérissables sous les mains de l’artiste et la symbolique qu’il leur confère va bien « au-delà de la vie ».
Entre verticalité et horizontalité, Jems Koko Bi se pose en tant que médiateur de deux forces. En puisant dans sa propre histoire et son vécu, l’artiste contribue à véhiculer un message universel dans ses œuvres et nous apporte un témoignage empreint de sensibilité sur un matériau végétal auquel il redonne vie.